A partir de septembre 2017, les nouveaux types de véhicule seront soumis à une évolution marquante en matière d'émissions polluantes: le cycle NEDC laisse place au nouveau cycle WLTP (Worldwide harmonized Light duty Test Procedure) auquel sont adjointes des mesures d'émissions en conditions de conduite réelles (RDE - Real Driving Environment. Néanmoins, selon l’organisation indépendante ICCT, ces changements ne sont pas une garantie suffisante pour réduire significativement les émissions d’oxyde d’azote.
L’ICCT (The International Council on Clean Transportation) est une organisation non gouvernementale (ONG). Cette association a été à l’origine de la révélation du scandale Volkswagen aux Etats-Unis en septembre 2015, non sans avoir alerté le grand public dès 2014 de la faiblesse du procédé d’homologation en Europe des véhicules en matière d’émissions d’oxyde d’azote (NOx).
Avec l’évolution des normes d’homologation, le transport routier (véhicules légers et poids lourds) émet de moins en moins d’oxyde d’azote. Il n’en reste pas moins que ce dernier reste le contributeur majeur en matière d’émissions de NOx. Il représente environ 45% des émissions totales d'oxyde d'azote en Europe (35% en ne tenant compte que des véhicules diesel). Il est donc nécessaire et indispensable de continuer les efforts en la matière.
Toutefois, l’ICCT craint que les nouvelles normes Euro 6d temp ne soient pas aussi efficaces qu’espéré en matière de réduction des oxydes d’azote. En s’appuyant sur les dérives observées jusqu’à présent sur les procédés d’homologation et en prenant pour référence l’évolution des normes applicables aux véhicules industriels, l’ONG estime que les futures normes sont critiquables sur 3 points :
Les véhicules industriels sont pris en exemple car le passage des normes Euro V aux normes Euro VI a permis une réduction exceptionnelle des émissions de NOx en conditions de conduite réelles, passant de 4.500 mg/km (Euro V) à 210 mg/km (Euro VI). Dans le même temps, pour les véhicules légers, le passage des normes Euro 5 à Euro 6 a généré une réduction beaucoup plus modeste, passant de 800 mg/km en Euro 5 à 500 mg/km pour un véhicule répondant aux normes Euro 6.
Note: lorsque les normes Euro s’appliquent aux poids lourds, leur numéro d’homologation s’écrit en chiffres romains (Euro VI) tandis que les normes s’appliquant aux véhicules légers s’écrivent avec la numérotation classique, en chiffres arabes (Euro 6). D’autre part, les normes Euro V/5 et Euro VI/6 sont entrées en vigueur à des périodes similaires.
Les poids lourds équipés d'un moteur diesel doivent effectuer des mesures sur banc à rouleaux en conditions stabilisées sur 13 points (WHSC - World Harmonized Stationary Cycle) et en conditions transitoires (WHTC - World Harmonized Transient Cycle). Depuis l'application des normes Euro VI, sur le cycle WHSC, les organismes en charge de l'homologation sont tenus de choisir, au hasard, 3 points de fonctionnement supplémentaires, ce qui permet d'éviter qu'en dehors des plages de test, les émissions de gaz polluants deviennent anormalement élevées.
De plus, les poids lourds doivent effectuer des mesures sur route au cours de leur durée de vie afin de démontrer que le véhicule conserve ses capacités de dépollution. Par exemple, pour un poids lourd de plus de 7,5 tonnes, les émissions doivent être conformes (au facteur de correction près) aux normes d'homologation sur une durée minimum de 7 ans ou un kilométrage de 700.000 km.
Les normes Euro VI ont incité les constructeurs à combiner et optimiser les systèmes de dépollution, à savoir la recirculation des gaz d'échappement (EGR), le filtre à particules et les systèmes de réduction des NOx SCR (Selective Catalytic Reduction). Il s'agit, peu ou prou, des mêmes technologies qui seront utilisées pour dépolluer les gaz d'échappement des véhicules particuliers avec l'application des normes Euro 6d temp.
S’il est toujours regrettable de constater qu’il subsiste des failles dans le procédé d’homologation, il ne faut pas non plus oublier le nombre de chantiers auxquels les constructeurs automobiles se sont attaqués ces dernières années pour préparer l’application des prochaines normes Euro 6. Les résultats ne sont peut-être pas suffisamment probants aujourd'hui: au moins les bases sont posées pour demain.
Depuis fin 2014 (application des normes Euro 6) et en vue de l’application de l’évolution de cette norme à partir de septembre 2017, les constructeurs ont travaillé sur l’introduction d’un filtre à particules pour les moteurs essence à injection directe (réduction des émissions de particules fines), la maîtrise des émissions d’oxyde d’azote en condition de conduite réelles pour les moteurs diesel, le développement des circuits électriques en 48 volt permettant l’hybridation légère ou l’utilisation de composants alimentés électriquement plutôt que par la courroie accessoire du moteur (réduction de la consommation de carburant et des émissions de CO2), les véhicules hybrides rechargeables, sans oublier les véhicules électriques à forte autonomie.
A l’horizon 2020, les constructeurs continueront nécessairement leurs efforts pour diminuer significativement les émissions de CO2 et de NOx avec, en particulier, une généralisation des circuits électriques 48V à une large part de véhicules, la généralisation des systèmes de désactivation des cylindres sur les moteurs à essence, l’avènement des moteurs à taux de compression variable et de nouveaux modes de combustion (moteurs essence à auto allumage du carburant de type HCCI).
Enfin, l’affaire Volkswagen a permis de donner de la voix aux organisations indépendantes. Il ne fait aucun doute que ces dernières resteront vigilantes et seront entendues en cas de nouveau scandale. Si Volkswagen semble pouvoir surmonter la crise que le groupe traverse, tous les constructeurs n’ont pas forcément une assise financière aussi solide que le constructeur allemand. Dès lors, il n’est pas souhaitable, pour aucun constructeur, de se retrouver dans une situation similaire à celle que traverse Volkswagen actuellement.
A court et moyen terme, les ventes mondiales de Volkswagen ne semblent pas impactées. Toutefois, le groupe automobile allemand est redevable de nombreuses amendes aux montants très élevés. Dès lors, il y a un risque conséquent sur la santé financière et les ventes de véhicules du groupe sur le long terme car le constructeur a dû réduire certains de ses investissements (programmes sportifs, modèles non renouvelés, etc.).
Source : ICCT, Agence Européenne pour l’Environnement
Crédits photos: Daimler / Renault / Groupe PSA / Audi
Crédits illustrations: Guillaume Darding
on ne peut pas vraiment dire que le problème n'a pas été traité. En revanche, on peut toujours arguer du fait qu'il n'a pas été assez anticipé.
Il faut remonter aux années 2000 pour comprendre l'évolution des normes. A cette époque, les moteurs à essence à injection directe sont inexistant (Renault et PSA ont fait des tentatives qui ont été rapidement avortées avant que Volkswagen ne remette cette technologie au goût du jour quelques années plus tard). Or, qui dit injection indirecte dit quasi-absence de particules. Donc, personne n'a jugé utile de réguler les particules émises par un moteur essence.
Au milieu des années 2000, le diesel a une part de marché prédominante. Problème, les fumées noires (suies issues des particules fines) deviennent indésirables. D'où la norme Euro 5 qui rend obligatoire la monte d'un filtre à particules pour les moteurs diesel. Pendant ce temps-là, les ventes de moteurs essence à injection directe balbutient.
2010, les moteurs essence deviennent majoritairement à injection directe. Les législateurs se rendent compte que ces moteurs émettent beaucoup de particules fines. Il est donc logiquement décidé de prendre en compte les émissions de particules de ce type de moteur.
Toutefois, on ne peut pas changer la norme du jour au lendemain, il faut du temps pour adapter les moteurs et il y a donc une introduction progressive de limites de plus en plus drastiques au fil des années. Il est vrai qu'à l'heure actuelle, la norme autorise un moteur essence à injection directe à émettre 10x plus de particules fines qu'un moteur diesel (et cela a d'ailleurs été mis en lumière par plusieurs études réalisées par des organismes indépendants). Ce ne sera plus vrai dans quelques mois pour les nouveaux modèles.
Cela peut paraître frustrant de se dire qu'il faut attendre plusieurs années avant qu'une norme se mette en place. Néanmoins, ce délai n'est certainement pas du luxe. Il me semble que le récent exemple de Volkswagen est un excellent cas d'école.
Pour résumer succintement, suite au scandale qu'a subit Volkswagen en septembre 2015, le constructeur a développé une mise à jour de la calibration moteur en quelques semaines, ce qui prend normalement deux ans environ. Hors, depuis que Volkswagen a mis à jour la calibration moteur sur les véhicules clients, il semblerait que le taux de non-satisfaction après la mise à jour (perte de puissance, hausse de la consommation, pannes en série) soit assez élevé.
Il y a certainement des cas qui ne sont pas avérés et n'ont pas forcément de relation directe, mais il est aussi certain que le délai de développement n'a pas été respecté (et de loin) et que cela ne peut pas être sans conséquence sur les performances et/ou la fiabilité. Il en va de même pour faire évoluer un moteur ou développer un nouveau moteur apte à respecter des normes d'émissions plus strictes.