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Nouvelles normes Euro 6: les effets sur les émissions de NOx sont incertains

publié le 18 janvier 2017

A partir de septembre 2017, les nouveaux types de véhicule seront soumis à une évolution marquante en matière d'émissions polluantes: le cycle NEDC laisse place au nouveau cycle WLTP (Worldwide harmonized Light duty Test Procedure) auquel sont adjointes des mesures d'émissions en conditions de conduite réelles (RDE - Real Driving Environment. Néanmoins, selon l’organisation indépendante ICCT, ces changements ne sont pas une garantie suffisante pour réduire significativement les émissions d’oxyde d’azote.

L’ICCT (The International Council on Clean Transportation) est une organisation non gouvernementale (ONG). Cette association a été à l’origine de la révélation du scandale Volkswagen aux Etats-Unis en septembre 2015, non sans avoir alerté le grand public dès 2014 de la faiblesse du procédé d’homologation en Europe des véhicules en matière d’émissions d’oxyde d’azote (NOx).

Avec l’évolution des normes d’homologation, le transport routier (véhicules légers et poids lourds) émet de moins en moins d’oxyde d’azote. Il n’en reste pas moins que ce dernier reste le contributeur majeur en matière d’émissions de NOx. Il représente environ 45% des émissions totales d'oxyde d'azote en Europe (35% en ne tenant compte que des véhicules diesel). Il est donc nécessaire et indispensable de continuer les efforts en la matière.

Toutefois, l’ICCT craint que les nouvelles normes Euro 6d temp ne soient pas aussi efficaces qu’espéré en matière de réduction des oxydes d’azote. En s’appuyant sur les dérives observées jusqu’à présent sur les procédés d’homologation et en prenant pour référence l’évolution des normes applicables aux véhicules industriels, l’ONG estime que les futures normes sont critiquables sur 3 points :

Les véhicules industriels sont pris en exemple car le passage des normes Euro V aux normes Euro VI a permis une réduction exceptionnelle des émissions de NOx en conditions de conduite réelles, passant de 4.500 mg/km (Euro V) à 210 mg/km (Euro VI). Dans le même temps, pour les véhicules légers, le passage des normes Euro 5 à Euro 6 a généré une réduction beaucoup plus modeste, passant de 800 mg/km en Euro 5 à 500 mg/km pour un véhicule répondant aux normes Euro 6.

Note: lorsque les normes Euro s’appliquent aux poids lourds, leur numéro d’homologation s’écrit en chiffres romains (Euro VI) tandis que les normes s’appliquant aux véhicules légers s’écrivent avec la numérotation classique, en chiffres arabes (Euro 6). D’autre part, les normes Euro V/5 et Euro VI/6 sont entrées en vigueur à des périodes similaires.

Les poids lourds équipés d'un moteur diesel doivent effectuer des mesures sur banc à rouleaux en conditions stabilisées sur 13 points (WHSC - World Harmonized Stationary Cycle) et en conditions transitoires (WHTC - World Harmonized Transient Cycle). Depuis l'application des normes Euro VI, sur le cycle WHSC, les organismes en charge de l'homologation sont tenus de choisir, au hasard, 3 points de fonctionnement supplémentaires, ce qui permet d'éviter qu'en dehors des plages de test, les émissions de gaz polluants deviennent anormalement élevées.

De plus, les poids lourds doivent effectuer des mesures sur route au cours de leur durée de vie afin de démontrer que le véhicule conserve ses capacités de dépollution. Par exemple, pour un poids lourd de plus de 7,5 tonnes, les émissions doivent être conformes (au facteur de correction près) aux normes d'homologation sur une durée minimum de 7 ans ou un kilométrage de 700.000 km.

Les normes Euro VI ont incité les constructeurs à combiner et optimiser les systèmes de dépollution, à savoir la recirculation des gaz d'échappement (EGR), le filtre à particules et les systèmes de réduction des NOx SCR (Selective Catalytic Reduction). Il s'agit, peu ou prou, des mêmes technologies qui seront utilisées pour dépolluer les gaz d'échappement des véhicules particuliers avec l'application des normes Euro 6d temp.

S’il est toujours regrettable de constater qu’il subsiste des failles dans le procédé d’homologation, il ne faut pas non plus oublier le nombre de chantiers auxquels les constructeurs automobiles se sont attaqués ces dernières années pour préparer l’application des prochaines normes Euro 6. Les résultats ne sont peut-être pas suffisamment probants aujourd'hui: au moins les bases sont posées pour demain.

Depuis fin 2014 (application des normes Euro 6) et en vue de l’application de l’évolution de cette norme à partir de septembre 2017, les constructeurs ont travaillé sur l’introduction d’un filtre à particules pour les moteurs essence à injection directe (réduction des émissions de particules fines), la maîtrise des émissions d’oxyde d’azote en condition de conduite réelles pour les moteurs diesel, le développement des circuits électriques en 48 volt permettant l’hybridation légère ou l’utilisation de composants alimentés électriquement plutôt que par la courroie accessoire du moteur (réduction de la consommation de carburant et des émissions de CO2), les véhicules hybrides rechargeables, sans oublier les véhicules électriques à forte autonomie.

A l’horizon 2020, les constructeurs continueront nécessairement leurs efforts pour diminuer significativement les émissions de CO2 et de NOx avec, en particulier, une généralisation des circuits électriques 48V à une large part de véhicules, la généralisation des systèmes de désactivation des cylindres sur les moteurs à essence, l’avènement des moteurs à taux de compression variable et de nouveaux modes de combustion (moteurs essence à auto allumage du carburant de type HCCI).

Enfin, l’affaire Volkswagen a permis de donner de la voix aux organisations indépendantes. Il ne fait aucun doute que ces dernières resteront vigilantes et seront entendues en cas de nouveau scandale. Si Volkswagen semble pouvoir surmonter la crise que le groupe traverse, tous les constructeurs n’ont pas forcément une assise financière aussi solide que le constructeur allemand. Dès lors, il n’est pas souhaitable, pour aucun constructeur, de se retrouver dans une situation similaire à celle que traverse Volkswagen actuellement.

A court et moyen terme, les ventes mondiales de Volkswagen ne semblent pas impactées. Toutefois, le groupe automobile allemand est redevable de nombreuses amendes aux montants très élevés. Dès lors, il y a un risque conséquent sur la santé financière et les ventes de véhicules du groupe sur le long terme car le constructeur a dû réduire certains de ses investissements (programmes sportifs, modèles non renouvelés, etc.).

Source : ICCT, Agence Européenne pour l’Environnement
Crédits photos: Daimler / Renault / Groupe PSA / Audi
Crédits illustrations: Guillaume Darding

Guillaume Darding [administrateur]
le 30 août 2017 à 23h38
Bonjour Alexandre,

on ne peut pas vraiment dire que le problème n'a pas été traité. En revanche, on peut toujours arguer du fait qu'il n'a pas été assez anticipé.

Il faut remonter aux années 2000 pour comprendre l'évolution des normes. A cette époque, les moteurs à essence à injection directe sont inexistant (Renault et PSA ont fait des tentatives qui ont été rapidement avortées avant que Volkswagen ne remette cette technologie au goût du jour quelques années plus tard). Or, qui dit injection indirecte dit quasi-absence de particules. Donc, personne n'a jugé utile de réguler les particules émises par un moteur essence.

Au milieu des années 2000, le diesel a une part de marché prédominante. Problème, les fumées noires (suies issues des particules fines) deviennent indésirables. D'où la norme Euro 5 qui rend obligatoire la monte d'un filtre à particules pour les moteurs diesel. Pendant ce temps-là, les ventes de moteurs essence à injection directe balbutient.

2010, les moteurs essence deviennent majoritairement à injection directe. Les législateurs se rendent compte que ces moteurs émettent beaucoup de particules fines. Il est donc logiquement décidé de prendre en compte les émissions de particules de ce type de moteur.

Toutefois, on ne peut pas changer la norme du jour au lendemain, il faut du temps pour adapter les moteurs et il y a donc une introduction progressive de limites de plus en plus drastiques au fil des années. Il est vrai qu'à l'heure actuelle, la norme autorise un moteur essence à injection directe à émettre 10x plus de particules fines qu'un moteur diesel (et cela a d'ailleurs été mis en lumière par plusieurs études réalisées par des organismes indépendants). Ce ne sera plus vrai dans quelques mois pour les nouveaux modèles.

Cela peut paraître frustrant de se dire qu'il faut attendre plusieurs années avant qu'une norme se mette en place. Néanmoins, ce délai n'est certainement pas du luxe. Il me semble que le récent exemple de Volkswagen est un excellent cas d'école.

Pour résumer succintement, suite au scandale qu'a subit Volkswagen en septembre 2015, le constructeur a développé une mise à jour de la calibration moteur en quelques semaines, ce qui prend normalement deux ans environ. Hors, depuis que Volkswagen a mis à jour la calibration moteur sur les véhicules clients, il semblerait que le taux de non-satisfaction après la mise à jour (perte de puissance, hausse de la consommation, pannes en série) soit assez élevé.

Il y a certainement des cas qui ne sont pas avérés et n'ont pas forcément de relation directe, mais il est aussi certain que le délai de développement n'a pas été respecté (et de loin) et que cela ne peut pas être sans conséquence sur les performances et/ou la fiabilité. Il en va de même pour faire évoluer un moteur ou développer un nouveau moteur apte à respecter des normes d'émissions plus strictes.
Alexandre
le 20 septembre 2017 à 13h49
Merci de votre réponse, mais je ne suis pas convaincu. Je suis conseiller technique dans une concession Peugeot et des moteurs à injection directe il y en a depuis la norme euro 4. Par exemple les moteurs BMW THP équipant la gamme Peugeot de l'époque et encore une partie aujourd'hui. Les THP sont des moteurs turbo essence à injection directe et il m'est souvent arrivé de constater que leurs échappements étaient plus sale que les diesels avec FAP. Je connais aujourd'hui la raison. Cela dit, je me demande comment ces moteurs ont pu passer la norme euro 5 sans filtre à particules.
Il s'agit quand même d'un sujet grave. Les politiques et les médias tirent à boulet rouge sur le diesel et programme sa disparition au profit des véhicules essences qui émettent 20% de CO2 en plus. Pourquoi vouloir interdire une motorisation qui respecte les normes en vigueur et qui est plus propre que jamais ? Pourquoi faire la COP21 si derrière on a un park de véhicule essence ?? Si malgré les normes en vigueur on juge une motorisation trop polluante, ce n'est pas la motorisation qui est en cause ni le carburant, mais la norme qui est trop légère...
L'opinion général à cause des médias est de penser que le diesel est sale alors qu'il n'a jamais été aussi propre depuis les normes euro 5 et 6. Pourtant personne ne réagit et on va bientôt voir le prix du diesel au prix du super. Puis on expliquera que finalement le diesel pollue moins et il sera bien vu d'acheter un diesel plus cher que l'essence malgré le prix du carburant comme aujourd'hui il est bien vu d'acheter des hybrides 5000€ plus cher sans vraiment de rentabilité. L'état sera gagnant sur la vente du carburant. A baril de pétrole égale on a pris 20 centimes de taxe en 10 ans. A 1€ le litre, c'est énorme !!! Et c'est donc pas fini. Personne ne dit rien. C'est dingue.
Guillaume Darding [administrateur]
le 23 septembre 2017 à 22h49
Bonjour Alexandre,

bien sûr, le diesel est très avantageux en matière de CO2 par rapport à un moteur essence, mais il faut voir aussi les gaz polluants, surtout les NOx qui ont été l'objet du scandale Volkswagen. Certes, les moteurs respectent la norme, mais la norme est beaucoup trop laxiste et a occasionné des dérives inacceptables en conditions de conduite réelle (en espérant que les nouvelles normes corrigent significativement ce problème). C'est pour cette raison que le diesel est désormais puni.

D'autre part, si la norme était mal conçue, enfin surtout, elle n'était plus adaptée aux véhicules modernes, il ne faut pas perdre de vue que les constructeurs sont consultés lors de la mise en place des normes et qu'au final, si le cycle NEDC a perduré aussi longtemps, c'est que ça arrangeait beaucoup de monde. Si le scandale Volkswagen n'avait pas eu lieu en 2015, je ne voudrais pas refaire l'histoire, mais je pense que l'application des normes Euro 6d temp aurait été retardée ou largement modifiée (sans le RDE par exemple...).
JEAN PAUL THOMINE
le 28 novembre 2017 à 12h24
A quoi correspond donc la norme EURO 6 C ?
Guillaume Darding [administrateur]
le 28 novembre 2017 à 13h06
Bonjour Jean Paul, la norme Euro 6c est une norme intermédiaire qui ne s'applique qu'aux moteurs essence à injection directe. Concrètement, elle impose une diminution des émissions de particules fines en nombre de 6x10e12 à 6x10e11 à partir du 1er septembre 2018. Je vous invite à consulter le premier tableau de l'article sur les normes Euro 6d temp (https://www.guillaumedarding.fr/nouvelles-normes-d-emissions-euro-6d-temp-1856766.html) pour avoir une meilleure représentation de l'évolution des différentes normes Euro 6.
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